Vent, froid et hypothermie : prévenir les dangers invisibles en randonnée

randonnée - froid - hypothermie

Le froid en randonnée ne se manifeste pas toujours de manière spectaculaire. Parfois, il s’immisce lentement, porté par le vent ou l’humidité, jusqu’à affaiblir les plus solides. L’hypothermie peut transformer une belle aventure en situation critique.

Dans cet article, nous allons voir comment prévenir ces dangers invisibles en comprenant les mécanismes du froid, en préparant son équipement intelligemment et en apprenant à reconnaître les premiers signes d’hypothermie.


1. Le froid ne vient jamais seul : comprendre les mécanismes

Le froid en randonnée est rarement dû à la seule température. Il est presque toujours aggravé par deux facteurs majeurs : le vent et l’humidité. Ensemble, ils amplifient les pertes de chaleur corporelle.

A. L’effet Windchill : ce que ressent réellement votre corps

La température annoncée à la météo est une température sous abri (sauf précision contraire). L’effet windchill (ou refroidissement éolien), lui, permet de calculée la température ressentie au vent. Plus le vent souffle fort, plus la chaleur s’évacue rapidement par effet de convection (car la couche d’air au contact de la peau ne reste pas en place et n’a donc pas le temps de se réchauffer.

Par exemple :

  • 10 °C avec 30 km/h de vent équivaut à une température ressentie de 7 °C.
  • 5°C avec 30 km/h de vent équivaut à une température ressentie de 0 °C.
  • 0 °C avec 30 km/h de vent équivaut à une température ressentie de -6 °C.
  • -5 °C avec 30 km/h de vent équivaut à une température ressentie de -13 °C.
  • -10 °C avec 30 km/h de vent équivaut à une température ressentie de -20 °C.
  • 10 °C avec 60 km/h de vent équivaut à une température ressentie de 5 °C.
  • 5°C avec 60 km/h de vent équivaut à une température ressentie de -2 °C.
  • 0 °C avec 60 km/h de vent équivaut à une température ressentie de -9 °C.
  • -5 °C avec 60 km/h de vent équivaut à une température ressentie de -16 °C.
  • -10 °C avec 60 km/h de vent équivaut à une température ressentie de -23 °C.

Ce phénomène est redoutable en montagne ou sur les crêtes. Même bien équipé, si vous ne vous protégez pas du vent, vous perdez de la chaleur de façon critique.

Le meilleur équipement pour s’en prémunir c’est évidemment la veste étanche, coupe vent avec capuche.

B. L’humidité, cet ennemi sournois

L’humidité corporelle (transpiration) ou extérieure (pluie, neige, brouillard) augmente drastiquement les pertes de chaleur. Le corps mouillé se refroidit 25 fois plus vite que sec.

C’est pourquoi la gestion de l’humidité est importante pour rester au chaud : on s’équipe pour rester au sec contre les éléments extérieurs, mais on ne se couvre pas trop pour ne pas transpirer. Il faut s’avoir tout au long de sa rando, se vêtir et se dévêtir en fonction des efforts fournit.

rando raquette neige hypothermie

2. Préparer ses vêtements contre le froid et le vent

A. La règle des trois couches

C’est un classique… mais encore faut-il bien l’appliquer :

  1. Première couche (respirante)
    Son rôle est d’évacuer la transpiration.
    ✅ Matière idéale : laine mérinos, polyester technique.
    ❌ À éviter : coton (absorbe et garde l’humidité).
  2. Deuxième couche (isolante)
    Elle conserve la chaleur corporelle.
    ✅ Polaire respirante à adapter selon l’activité et la saison (évitez les doudounes qui sont plutôt faites pour avoir chaud quand on est statique à la pause ou au bivouac).
  3. Troisième couche (protectrice)
    C’est la barrière contre le vent et l’eau.
    ✅ Veste imperméable et coupe-vent (type Gore-Tex ou équivalent).
    Prenez la avec une capuche et des zips d’aération sous les bras (très utile pour évacuer votre transpiration).

S’il fait chaud, on peut bien sûr ne porter que la 1ère couche. S’il se met à pleuvoir, on peut ne porter que la première et la troisième couche.

Et moi, à c’est trois couches, je rajoute la notion de 4ème couche qui est ma doudoune que je n’utilise quand statique quand je suis sûr d’être à l’abri de la pluie (elle impérativement rester sèche pour l’étape).

B. Les extrémités, un point de faiblesse

La tête et le cou représentent une part importante des pertes de chaleur (30 à 50% selon les nombreuses sources fiables que je connais). Je dis souvent qu’un bonnet est aussi efficace qu’une polaire pour un poids bien plus faible (je n’exagère presque pas). Mais le bonnet en montagne ne doit pas remplacer la polaire, il doit être là en plus. Rappelez vous que dans les Alpes, il peut neiger à 2000 m en pleine été (ça met encore arrivé l’été dernier…)

Par contre, contrairement aux idées reçues, ont perd très peut de chaleur par les mains et les pieds. Mais ce sont des zones ou le froid se fait ressentir en premier, car le corp réduit la taille des vaisseaux sanguins de ces parties (vaso-constriction), pour privilégier les organes vitaux au niveau du tronc et de la tête. Par températures négatives ce sont donc des zones sensibles aux gelures ! Par températures positives vous pouvez avoir froid aux mains et aux pieds, il n’y a aucun risque à part d’avoir l’onglée (qui fait très mal quand le sang revient…)

  • Mains : gants + surmoufles imperméables si besoin. Les moufles tiennent plus chaud que les gants. (en randonnée hivernale, ayez toujours une paire de gants en plus dans votre sac si jamais vous perdez un gant).
  • Pieds : chaussettes techniques ou chaussures sèches éventuellement pour l’hiver. Si vos chaussures sont mouillées, changez les chaussettes dès que possible.

C. Le vêtement en pause : la doudoune de bivouac

Je vous en parlait juste avant, en quatrième couche, dès que vous vous arrêtez, enfilez une couche supplémentaire immédiatement. Il ne faut jamais attendre d’avoir froid pour se couvrir.

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3. S’isoler du sol : une nécessité absolue

Lorsque vous vous asseyez ou que vous bivouaquez, le sol froid absorbe la chaleur de votre corps par conduction. C’est un vecteur de froid souvent sous-estimé.

A. Lors d’une pause

  • Utilisez un coussin mousse ou votre sac à dos comme isolant.
  • Ne vous asseyez pas à même le sol humide ou neigeux.
  • En hiver, même sur un banc : isolez-vous !

B. En bivouac

  • Investissez dans un matelas à fort pouvoir isolant (R-value > 4 pour les conditions froides).
  • Ajoutez un tapis mousse sous le matelas gonflable si besoin en hiver.
  • Dormir avec un matelas de mauvaise qualité en hiver, c’est comme dormir dans un duvet percé.
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4. Adapter sa gestion de l’effort et des pauses

La lutte contre l’hypothermie se joue aussi dans votre rythme de marche et vos pauses. Le froid attaque quand on s’arrête. Voici quelques règles simples :

A. Adopter une allure régulière

  • Évitez les efforts trop intenses qui déclenchent une sudation excessive.
  • Préférez une marche modérée, régulière, qui chauffe sans faire transpirer.
  • Si vous transpirez malgré tout, ouvrez les zips (ventilation sous les bras, ouverture frontale), et retirez une couche si nécessaire.

B. Organiser les pauses

  • Faites des pauses courtes (5-10 min max), régulières, et à l’abri du vent si possible.
  • Remettez immédiatement une couche dès l’arrêt, même pour quelques minutes.
  • Mangez régulièrement des en-cas énergétiques, même sans faim : votre corps a besoin de carburant pour produire de la chaleur.
  • Forcez-vous à boire, même si vous n’avez pas soif, car plus vous êtes bien hydraté, plus votre sang est fluide, plus il circule bien et plus il joue son rôle de thermorégulateur !

5. Détecter les premiers signes d’hypothermie

L’hypothermie peut progresser lentement, sans que vous vous en rendiez compte tout de suite. Il est crucial de savoir reconnaître ses premiers symptômes.

A. Avant l’hyporthermie (37 à 35 °C de température corporelle)

  • Frissons
  • Si les mains sont à l’air libre difficulté à joindre le pouce et l’auriculaire
  • petite sensation de raideur générale

👉 A l’apparition de ces signes, n’attendez pas pour vous réchauffer !

B. Hypothermie légère (32 à 35 °C de température corporelle)

  • Frissons incontrôlables
  • Difficultés à parler (muscle de la mâchoire engourdis, bafouillements)
  • Fatigue anormale, somnolence
  • Coordination altérée, gestes maladroits
  • Perte de jugement, apathie

👉 C’est à ce moment-là qu’il faut agir rapidement. Et cette phase peut être assez vite atteinte !

C. Hypothermie avancée (28 à 32 °C)

  • Disparition des frissons
  • Confusion mentale
  • Ralentissement du rythme cardiaque et respiratoire
  • Pupilles dilatées
  • Rigidité musculaire

👉 À ce stade, il faut impérativement mettre la personne à l’abri, la réchauffer lentement et appeler les secours. Mais surtout il faut agir avant cette phase !!!

D. Hypothermie sévère (en dessous de 28 °C)

  • Inconscience
  • Pouls très faible voire absent
  • Risque de fibrillation cardiaque

👉 C’est une urgence vitale. Toute tentative de réchauffement doit être douce, sans mouvements brusques. Là ont est proche de la mort !

randonnée - neige - froid
Un peu de ciel bleu pour ne pas vous démoraliser !

6. Réagir face à l’hypothermie

Si vous suspectez une hypothermie :

  1. Mettez la personne à l’abri du vent et de l’humidité.
  2. Enlevez les vêtements mouillés si vous avez des vêtements secs de rechange.
  3. Isolez-la du sol, couvrez-la avec couverture de survie, sac de couchage, vêtements secs.
  4. Réchauffement passif : par la chaleur de votre corps (contact peau à peau sous sac de couchage), ou en cocon (plusieurs dans une tente).
  5. Ne donnez pas d’alcool, mais des boissons chaudes (mais trop chaud) sucrées si la personne est consciente.
  6. En cas d’hypothermie avancée et sévère, ne pas frictionner la personne (risque d’afflux sanguin)
  7. Appelez les secours dans tout les cas pour prendre un avis médical.

Le mouvement réchauffe, donc si la personne est encore capable, faite là sauter sur place, courir, etc…


Mieux vaut prévenir que réchauffer

Le froid est insidieux. Il ne crie pas, ne brûle pas… mais il épuise, il affaiblit, il anesthésie. Et quand il s’accompagne de vent ou d’humidité, il peut devenir dangereux en quelques minutes.

Mais la bonne nouvelle, c’est qu’avec de la préparation, du bon sens, et l’équipement adapté, on peut totalement maîtriser ce risque. Randonner dans le froid devient alors une aventure vivifiante, exigeante, mais accessible.

Anticipez. Superposez intelligemment vos couches. Gérez vos efforts. Écoutez votre corps. Et surtout, ne laissez jamais l’hypothermie vous prendre par surprise. Anticipez, agissez !

Je vous souhaite de belles Aventures

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Si la randonnée hivernale vous intéresse, voici une vidéo ou je présente tout le matériel que j’emporte avec moi pour marcher et bivouaquer en hiver !

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